Thème N°17 : Action des acides sur les métaux

Matériel et Produits :

Fer en poudre - Clous - Zinc en poudre - Zinc en grenailles - Plomb en grenailles - Cuivre en tournures - Electrodes de cuivre, argent, zinc, fer et plomb (2 de chaque) - Electrode à fil de platine - Sodium métal - Potassium métal - Acide chlorhydrique 2 M - Acide sulfurique 2 M - Acide nitrique 2 M - Acide nitrique fumant - Acide phosphorique - Phosphate de zinc - Phosphate de Manganèse - Phénolphtaléine - Soude 2 M - Iodure de potassium 0,1 M - Acide chlorhydrique 1 M - Formol - Nitrate d'argent 0,1 M - Ammoniaque concentré - Tube à essais (12) - Portoirs (2) - Voltmètre numérique - Fils électriques - Ponts salins - Petits bechers (10) - Becher 250 ml (3) - Entonnoir -

Introduction :

Les acides peuvent réagir sur les métaux et les oxyder pour donner les ions métalliques correspondants. C'est cette attaque source de corrosion importante que nous allons étudier ici. Nous examinerons d'abord le cas des acides minéraux "non oxydants" HCl et H2SO4 qui agissent par l'ion hydronium H3O+. L'action de l'acide nitrique sur les métaux sera ensuite envisagée; dans ce cas c'est l'ion nitrate qui est l'oxydant. Pour terminer l'action de l'acide phosphorique sur le fer ou parkérisation sera évoquée. Enfin le cas des métaux extrêmement réducteurs (sodium et potassium) sera examiné.

Données Thermodynamiques :

H3O+ / H2 E0 = 0 V H2O / H2 E0 = - 0,84 V

NO3- / NO E0 = 0,94 V Zn2+ / Zn E0 = - 0,76 V

Cu2+ / Cu E0 = 0,34 V Pb2+ / Pb E0 = - 0,13 V

Ag+ / Ag E0 = 0,80 V Fe2+ / Fe E0 = - 0,44 V (milieu perchlorique)

Na+ / Na E0 = -2,70 V K+ / K E0 = -2,93 V

HSO4- / H2S E0 = 0,32 V HSO4- / SO2 E0 = 0,14 V

I) Action de l'acide chlorhydrique et de l'acide sulfurique :

Ces deux acides sont des acides forts totalement dissociés et leur anion (Cl- ou SO42-) ne possède pas de propriétés oxydantes marquées. C'est par l'ion hydronium H3O+ que ces acides sont capables d'oxyder certains métaux.

1) Action sur les métaux très réducteurs (zinc, et fer) :

Introduire un peu de métal en poudre ou en grenaille dans un tube à essai puis verser 1 ou 2 ml d'une solution d'acide chlorhydrique 1 M. On observe un dégagement de dihydrogène que l'on caractérisera en le faisant aboyer à la flamme. Caractériser ensuite les ions métalliques formés. Fe2+ donne un précipité vert avec la soude, Zn2+ donne un précipité blanc soluble dans un excès de soude. Procéder de même avec H2SO4. On peut utiliser un acide plus concentré 5 M ou chauffer légèrement pour accélérer les réactions.

2) Action sur les métaux peu réducteurs (cuivre et argent) :

Procéder de la même manière, aucune réaction ne se produit.

II) Interprétation - Notion de couple oxydoréducteur :

Les expériences précédantes permettent de classer les métaux en deux catégories : ceux qui sont oxydables par H3O+ et ceux qui ne le sont pas. On peut aller un peu plus loin et chercher à tous les classer selon leur pouvoir réducteur. (Voir thème N° 11).

III) Action de l'acide nitrique :

L'acide nitrique est un oxydant puissant qui peut oxyder les métaux nobles tels que cuivre et argent non attaqués par les autres acides. Cette propriété est donc due à l'ion nitrate NO3- et non à l'ion H3O+.

1) Action sur les métaux très réducteurs (zinc, et fer ) :

Dans un tube à essais introduire un peu de zinc en poudre. Verser un peu d'acide nitrique 5 M. On observe l'attaque du métal avec formation de vapeurs rousses abondantes de NO2. La formation de NO2 à la place de H2 montre que l'oxydant est ici l'anion NO3- et non comme précédemment l'ion H3O+.

2) Oxydation du cuivre en l'absence d'air :

Prendre un becher et y introduire un petit entonnoir que l'on placera la tige vers le haut. Sous l'entonnoir introduire du cuivre en tournures. Remplir d'eau puis surmonter la tige de l'entonnoir d'un tube à essais plein d'eau. Ce dispositif va permettre de procéder à l'abri de l'air. Enlever le maximum d'eau possible sans que de l'air pénètre dans le tube (s'exercer plusieurs fois). Introduire alors avec précaution de l'acide nitrique concentré dans le becher et homogénéiser tout en soulevant l'entonnoir pour que l'acide soit en contact avec le cuivre. Chauffer et attendre quelques minutes. On constate l'attaque du cuivre, un dégagement gazeux se forme et le gaz incolore formé va remplir petit à petit le tube à essais. Sous l'entonnoir une coloration bleue se développe petit à petit due à l'apparition des ions Cu2+. Quand le tube est plein de gaz le retourner à l'air libre une coloration rouge apparaît aussitôt.

Interprétation :

En absence d'air, l'ion nitrate oxyde le cuivre, on obtient le monoxyde d'azote NO et l'ion Cu2+.

NO3- + 4 H+ + 3 e- ---> NO + 2 H2O

Cu ---> Cu2+ + 2 e-

2 NO3- + 8 H+ + 3 Cu ---> 2 NO + 4 H2O + 3 Cu2+ (HNO3 dilué)

8 HNO3 +3 Cu ---> 2 NO + 4 H2O +3 Cu2+ + 6 NO3- (HNO3 fumant)

Quand on retourne le tube le NO formé incolore entre en contact avec l'air et s'oxyde en vapeurs rousses de dioxyde d'azote NO2.

2 NO + O2 ----> 2 NO2

3) Oxydation de l'argent en présence d'air :

a) Préparation préalable :

Dans un ballon préparer un miroir d'argent. Pour cela introduire 10 ml de solution 0,1 M de nitrate d'argent, verser goutte à goutte de l'ammoniaque concentré ; on observe la formation d'un précipité qui se redissous dans un excès d'ammoniaque. C'est le réactif de Tollens caractéristique des aldéhydes. Ajouter alors 1 ml de solution de glucose et attendre la formation du miroir d'argent au fond du ballon (éventuellement chauffer très légèrement au bain-marie). Rincer abondamment à l'eau puis retourner le ballon pour le sécher.

b) Expérience :

Verser un peu d'acide nitrique 5 M dans le ballon et agiter doucement d'un mouvement tournant. L'argent est attaqué et on observe parfois la formation de vapeurs rousses de dioxyde d'azote. On peut éventuellement montrer la formation de Ag+, pour cela diluer à l'eau puis ajouter un peu de chlorure de sodium, on observe la formation d'un précipité blanc de chlorure d'argent.

Remarque :

On peut aussi procéder directement avec de l'argent en fil mais l'expérience est moins jolie. De plus cette expérience illustre une utilisation courante de l'acide nitrique au laboratoire : " faire la vaisselle difficile ".

4) Passivation du fer :

a) Action de l'acide nitrique dilué sur le fer :

Dans un petit becher introduire de l'acide nitrique 5 M. A l'aide d'une pince en bois y plonger la moitié inférieure d'un clou pendant quelques secondes. On observe l'attaque rapide du fer, la solution prend une teinte rouille (Fe3+) et d'abondantes vapeurs rousses (NO2) se forment. Retirer le clou et le rincer dans un becher d'eau. Garder le clou.

b) Action de l'acide nitrique fumant sur le fer :

Procéder exactement de la même manière que précédemment. Quand le clou entre en contact avec l'acide fumant l'attaque à lieu mais elle s'arrête presque immédiatement. Retirer le clou et comparer son aspect avec le précédant. On constate qu'il prend un aspect très brillant (presque argenté). L'oxydation à produit ici une pellicule d'oxyde magnétique de fer Fe3O4 qui protège le fer et la réaction s'arrête, c'est le phénomène de passivation. Montrer cette protection en replongeant le clou dans l'acide dilué, l'attaque n'a plus lieu. On peut montrer la fragilité de cette protection, il suffit de percer la pellicule d'oxyde en touchant le clou avec une baguette de verre ou un fil métallique pour que l'attaque reprenne immédiatement. (il se produit un phénomène de micro-pile : voir thème N°13). Cette passivation permet le transport de l'acide nitrique fumant dans des fûts de fer.

Remarques :

Cette expérience est délicate à réaliser. Il suffit d'un peu d'humidité pour que la passivation n'ai pas lieu, surtout si l'acide utilisé n'est pas vraiment "fumant". S'exercer plusieurs fois pour bien la réussir. Utiliser des clous neufs et propres et bien les essuyer avec un papier filtre juste avant de les plonger dans l'acide. De même ne verser l'acide dans le becher qu'au dernier moment pour éviter qu'il ne prenne l'humidité. Enfin ne pas hésiter à changer le bain d'acide si on désire refaire l'expérience car au bout d'une ou deux fois l'acide ne sera plus assez pur pour que la passivation soit possible. Si l'acide utilisé est vraiment fumant et pas trop "éventé" l'expérience est plus facile.

IV) Action de l'acide phosphorique :

Un procédé industriel de protection du fer contre la corrosion utilise l'action de l'acide phosphorique sur ce métal. Il est connu sous le nom de phosphatation ou parkérisation. La pièce métallique à protéger est traitée par une solution chaude contenant : phosphate de manganèse, phosphate de zinc et acide phosphorique. Il se forme à sa surface une pellicule imperméable de phosphates métalliques complexes qui la protège de la corrosion. Voir thème N°13 pour le mode opératoire. Les carrosseries automobiles sont ainsi traitées avant d'être peintes.

V) Cas des métaux extrêmement réducteurs (sodium et potassium)

Remplir un cristallisoir (le plus large possible), ou tout simplement un évier, d'eau du robinet. Ajouter un peu de phénolphtaléine puis jeter un petit morceau de sodium dans l'eau. Le sodium s'enflamme et se met à tourbillonner dans le récipient. Sa trajectoire est matérialisée par l'apparition d'un sillage rose-violacé. Des bulles gazeuses sont visibles autour du morceau de sodium. Faire la même expérience avec le potassium, la réaction est plus violente, on voit le potassium brûler. Si cela est possible on peut recouvrir le récipient d'une plaque de verre qui protégera d'éventuelles projections.

Interprétation :

Ces métaux sont suffisamment réducteurs pour que leur oxydation soit possible même par l'eau seule sans présence d'un autre acide. C'est pourquoi nous les avons exclus de l'étude précédante.

Na ----> Na+ + 1 e- (E0 = -2,7 V)

2 H2O + 2 e- ---> 2 OH- + H2 (E0 = -0,84 V )

Na + H2O ---> Na+ + OH- + H2